Minute pastorale – No. 239

    DEMANDER PARDON POUR LA MÉCHANCETÉ DU MONDE

    Au livre de la Genèse, deux versets introduisent le déclenchement du déluge. Les voici :

    Dieu vit que la méchanceté de l’homme était grande sur la terre et que son cœur ne formait que de mauvais desseins à longueur de journée. Dieu se repentit d’avoir fait l’homme sur la terre et il s’affligea dans son cœur (Gn 6, 5-6).

    Deux psaumes expriment la même situation :

    Des cieux, le Seigneur se penche vers les fils d’Adam pour voir s’il en est un de sensé, un qui cherche Dieu. Tous, ils sont dévoyés; tous ensemble, pervertis : pas un homme de bien, pas même un seul (Ps 51, 3-4).

    Car je vois dans la ville discorde et violence : de jour et de nuit, elles tournent en haut des remparts. Au-dedans, crimes et malheurs; au-dedans, c’est la ruine : fraude et brutalité ne quittent plus ses rues (53, 10-12).

    L’attention aux médias nous met encore sous les yeux la grande méchanceté de notre monde contemporain et une méchanceté qui se multiplie à longueur de journée. Nous vivons dans le péché, ce péché qui continue de s’opposer au plus grand et au plus important commandement de Jésus : celui d’aimer Dieu et d’aimer notre prochain comme nous-mêmes. Cela explique pourquoi Dieu s’afflige, tout simplement parce nos péchés à l’endroit de notre prochain le blesse énormément. Dans sa première lettre, l’apôtre Jean écrit ceci : Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu et qu’il haïsse son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, ne peut pas aimer Dieu qu’il ne voit pas (1 Jn 4, 20-21).

    Nous tuons nos frères et sœurs de la bande de Gaza, d’Ukraine, d’Haïti, du Soudan en laissant la guerre les priver de tout : sécurité, accès à la nourriture et à l’eau; nous les violentons, nous les abandonnons. Nous tuons nos frères et sœurs qui se noient en mer Méditerranée et auxquels nous refusons accès à nos frontières de pays riches. Oui, nous sommes tous et toutes complices de ces tueries en finançant les armes qui les tuent, et surtout en omettant de nous opposer aux situations de famine, aux violences sexuelles, aux criantes injustices : Un péché grave que le pape François décrivait comme celui de la plus terrible INDIFFÉRENCE de notre part. Alors se pose à nous, chrétiens, la très sérieuse question : DEMANDONS-NOUS PARDON À DIEU POUR CETTE MÉCHANCETÉ? Le faisons-nous non seulement personnellement mais surtout en communauté chrétienne?

    Même chez nous, demandons-nous pardon pour tous ces abus sexuels faits aux enfants d’ici? Demandons-nous pardon pour toutes ces atteintes à l’endroit des droits autochtones? Demandons-nous pardon pour tout ce saccage du don divin de la Création? Demandons-nous pardon pour tous nos péchés d’omission; ce que nous devrions faire et ce que nous ne faisons pas?

    Au début de la célébration de l’eucharistie, nous demandons pardon; dans le Gloire à Dieu, nous chantons l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde, le credo mentionne que nous croyons au pardon des péchés; et nous entendons ces paroles de Jésus sur la coupe : pour la rémission des péchés. Paroles devenues machinales, automatiques, sans compassion et teintées d’indifférence. En célébrant l’eucharistie, demandons-nous sincèrement pardon pour la méchanceté du monde?

    Jésus, dans sa passion, a prié Dieu le Père de nous pardonner en disant : Car ils ne savent pas ce qu’ils font. Et nous, savons-nous ce que nous faisons aux autres et savons –nous ce qu’il nous faudrait faire? Le Christ en croix veut que nous nous unissions à lui pour demander pardon : un pardon à ne pas simplement consommer mais un pardon qui implique notre propre responsabilité de demander pardon avec lui. Au moment de son agonie, il avait besoin que ses disciples veillent et prient avec lui; ils les avaient trouvés endormis! Ils l’avaient abandonné, laissé seul! Et nous?

    Pour demander pardon, il faut beaucoup d’humilité et surtout il faut beaucoup aimer et Dieu et son prochain.

    Qui donc est Dieu que nul ne peut aimer s’il n’aime l’homme?
    Qui donc est Dieu qu’on peut si fort blesser en blessant l’homme?
    (Hymne au matin du samedi de la semaine I)

    Jean-Pierre Joly, ptre
    (septembre 2025)